Thursday, May 22, 2014

 

Their Minds Remain Empty

Jean de La Bruyère (1645-1696), "De la mode," Les caractères, ou, Les moeurs de ce siècle (tr. Helen Stott):
Some people have such an eager thirst for knowledge that they cannot bear to be ignorant of anything. They dip into everything and master nothing; they prefer to learn much rather than learn well, to be superficial and weak in many sciences rather than to be deeply versed in one. Thus they find that on every subject there is someone who excels them and can correct them; they are mere dupes of their own vain curiosity, and can only after long and painful efforts overcome their gross ignorance.

Others possess the keys of all learning, yet never use them. They spend their lives in puzzling out all the known languages, and even would discover that which is spoken in the moon. The most useless idioms, the most ridiculous and mystical characters, are precisely those which awake their passion for languages and excite their industry. They pity those who are contented to know their own language, or at most, Greek and Latin. Such people read all books of history and yet know nothing at all of history; they skim through so many books that they profit by none; they could not well be more barren of facts and principles, but they certainly have the best collection of words and phrases which can be imagined; their memories are oppressed and loaded with them, while their minds remain empty.
In French:
Quelques-uns par une intempérance de savoir, et par ne pouvoir se résoudre à renoncer à aucune sorte de connaissance, les embrassent toutes et n'en possèdent aucune: ils aiment mieux savoir beaucoup que de savoir bien, et être faibles et superficiels dans diverses sciences que d'être sûrs et profonds dans une seule. Ils trouvent en toutes rencontres celui qui est leur maître et qui les redresse; ils sont les dupes de leur curiosité, et ne peuvent au plus, par de longs et pénibles efforts, que se tirer d'une ignorance crasse.

D'autres ont la clef des sciences, où ils n'entrent jamais: ils passent leur vie à déchiffrer les langues orientales et les langues du nord, celles des deux Indes, celles des deux pôles, et celle qui se parle dans la lune. Les idiomes les plus inutiles, avec les caractères les plus bizarres et les plus magiques, sont précisément ce qui réveille leur passion et qui excite leur travail; ils plaignent ceux qui se bornent ingénument à savoir leur langue, ou tout au plus la grecque et la latine. Ces gens lisent toutes les histoires et ignorent l'histoire; ils parcourent tous les livres, et ne profitent d'aucun; c'est en eux une stérilité de faits et de principes qui ne peut être grande, mais à la vérité la meilleur récolte et la richesse la plus abondante de mots et de paroles qui puisse s'imaginer: ils plient sous le faix; leur mémoire en est accablée, pendant que leur esprit demeure vide.



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